Comprendre les phénomènes chimiques de la digestion.
La digestion est un ensemble de phénomènes mécaniques et chimiques étroitement imbriqués qui transforment des aliments, substances étrangères à l'organisme, en éléments nutritifs assimilables dans le sang et utilisables par le corps comme matériau ou comme source d'énergie.
La digestion chimique des aliments repose sur l'action des enzymes, facilitée ou non par les diverses sécrétions des glandes digestives.
Digestion : rôle des sucs digestifs
La salive humidifie le bol alimentaire et en fait une bouillie accessible aux différentes enzymes de l'estomac.
L'acide chlorhydrique sécrété en abondance par l'estomac est indispensable à l'action d'enzymes gastriques actives sur les protéines.
- Il inhibe l'action de l'amylase salivaire.
- Une substance présente dans le suc gastrique, le facteur intrinsèque, permet l'absorption ultérieure de la vitamine B12.
- Le suc gastrique très acide exerce aussi une fonction désinfectante puissante contre les bactéries présentes dans l'alimentation : aucune bactérie ne peut vivre dans ce milieu, à l'exception de l'helicobacter pylori découvert seulement en1990.
Le suc intestinal, dont nous fabriquons 1 à 2 litres par jour, est neutre ou légèrement alcalin. Composé d'eau et de mucus, il contient peu d'enzymes, mais permet l'activité des enzymes pancréatiques.
La bile contient entre autres substances des sels biliaires dont le rôle majeur est de disperser les graisses alimentaires en millions de minuscules gouttelettes appelées chylomicrons, condition indispensable à la bonne activité des lipases ou enzymes digérant les lipides.
Le suc pancréatique contient de nombreuses enzymes digestives.
Rôle des enzymes dans la digestion
Une enzyme est une protéine qui, présente en infime quantité, induit et accélère une réaction chimique spécifique. Les enzymes digestives transforment les molécules complexes des aliments en molécules simples capables de traverser la barrière intestinale et utilisables par le corps pour synthétiser ses propres substances ou fournir de l'énergie.
- Dans la bouche, l'amylase salivaire commence à transformer les amidons en glucose. Si l'on mastique de longues minutes de la mie de pain par exemple, le léger goût sucré qui apparaît traduit cette transformation.
- Dans l'estomac, un groupe d'enzymes regroupées sous le nom de pepsine fragmente les grosses molécules de protéines (plusieurs centaines d'acides aminés) en molécules plus petites, les peptides (une ou deux dizaines d'acides aminés. Quelques substances simples commencent à être absorbées : l'eau, l'alcool, un peu de glucose.
- Dans l'intestin grêle, les enzymes sont très actives
- les lipases pancréatiques transforment les graisses alimentaires, dispersées par l'action des sels biliaires, en acides gras simples ;
- les protéases pancréatiques démontent en acides aminés les peptides issus de la digestion gastrique des protéines ; parmi ces protéases, les plus connues sont la trypsine, la chymotrypsine et la carboxypeptidase ;
- l'amylase pancréatique, la dextrinase, la lactase, la maltase, la saccharase et la glucoamylase des cellules intestinales réduisent tous les glucides en sucres simples, tels le glucose, le galactose et le fructose ;
- des nucléases découpent l'ADN et l'ARN des cellules animales ou végétales en unité de base, les nucléotides.
Au terme de l'action des enzymes, tous les aliments sont transformés en éléments nutritifs élémentaires qui vont traverser la membrane intestinale et passer dans le sang, ainsi que l'eau, les vitamines et les sels minéraux qui sont absorbés sans modification.
Les déchets non digestibles par les enzymes, comme les fibres végétales dures, sont évacués vers le côlon.
Digestion chimique des glucides, lipides et protides
Digestion des glucides
L'alimentation apporte :
- des glucides complexes digestibles, le glycogène animal ou l'amidon végétal qui sont de longues chaînes de centaines d'unités de base, le glucose
- des glucides complexes non digestibles par nos enzymes, les celluloses des fibres végétales, que seuls les animaux herbivores peuvent digérer
- des glucides composés de deux unités de base : le saccharose ou sucre de table (glucose+fructose), le lactose du lait (glucose+galactose), le maltose (glucose+glucose)
- une faible quantité de glucides simples : glucose et fructose surtout.
Étapes de la digestion des glucides :
- La digestion des glucides complexes commence dans la bouche sous l'effet de l'amylase salivaire. Le peu de glucose libéré à ce stade pourra être absorbé au niveau de l'estomac.
- La digestion finale des glucides complexes et des glucides composés se poursuit dans l'intestin grêle sous l'effet des enzymes pancréatiques et intestinales.
- En moins de dix minutes, tous les glucides complexes sont fragmentés.
- Il n'en ressort que trois nutriments : du glucose, du fructose et du galactose, seuls susceptibles d'être assimilés par l'organisme.
- Les glucides élémentaires passent par le foie où la plus grande partie est stockée sous forme de glycogène pour être relarguée dans le sang au fur et à mesure des besoins tout au long de la journée.
Diverses maladies métaboliques héréditaires sont dues à l'absence ou la défaillance d'une enzyme comme la galactosémie congénitale due à l'absence de lactase capable de dissocier le lactose en glucose + galactose. En effet, non digérés, ces glucides sont fermentés par les bactéries du côlon qui libèrent des substances toxiques intervenant dans la lésion de la muqueuse intestinale et son inflammation.
L'intolérance de nombreux adultes au lait de vache tient aussi à une perte progressive de la fabrication de lactase.
Digestion des lipides
Presque tous les lipides alimentaires sont fournis sous forme de triglycérides, soit trois molécules d'acides gras fixés sur une même molécule de glycérol.
- Une part plus faible de lipides est fixée sur des protéines, sur du phosphore ou sous forme de cholestérol.
- Peu d'acides gras libres sont présents dans les aliments.
La mastication dans la bouche et le malaxage dans l'estomac diluent les lipides alimentaires au sein du chyme. Les sels biliaires les dispersent en chylomicrons, ce qui les rend très accessibles à l'action des lipases pancréatiques.
Les lipases pancréatiques cassent les molécules de triglycérides, libérant un monoglycéride (glycérol+acide gras qui seront séparés ultérieurement par les cellules intestinales) et deux acides gras. D'autres cassent les lipoprotéines ou les phospholipides pour en isoler les acides gras.
Les acides gras sont absorbés directement par la muqueuse intestinale, avec les vitamines liposolubles qui les accompagnent.
Digestion des protides
Les protides, ou protéines sont de longues chaînes composées à partir de 20 éléments de base, les acides aminés, comme tous les mots sont formés à partir des mêmes lettres de l'alphabet.
- Les chaînes plus courtes, quelques dizaines d'acides aminés, sont appelées polypeptides.
- Les chaînes très courtes, quelques acides aminés, sont des peptides.
La digestion des protéines commence dans l'estomac, quand la pepsine gastrique découpe les protéines en gros polypeptides. Cette action se fait d'autant mieux que le milieu gastrique est très acide.
Dans l'intestin grêle, les protéases pancréatiques dont la trypsine et la chymotrypsine fragmentent les gros polypeptides en petits polypeptides et en peptides. Ces petits protides sont finalement démontés en acides aminés par les enzymes dans les cellules de la muqueuse intestinale, dont l'aminopeptidase qui détache les acides aminés l'un après l'autre au bout de la chaîne peptidique.
Seuls les acides aminés traversent la muqueuse intestinale. Tout passage d'un peptide ou d'une protéine complexe provoquerait une réaction immunitaire de l'organisme qui ne supporte aucune protéine étrangère, sauf les anticorps du lait maternel chez le nourrisson.
Digestion des fibres
Les fibres constituent l'enveloppe ou l'armature des végétaux. Elles facilitent le transit intestinal en augmentant le volume du bol alimentaire puis des selles, ce qui stimule les fibres musculaires intestinales et coliques.
- Les fibres insolubles sont la lignine, très dure et qui n'est pas du tout digérée, et les celluloses partiellement dégradées par les bactéries du côlon par un processus de fermentation.
- Les fibres solubles sont les pectines, les gommes et les mucilages que l'on trouve dans les fruits ou le son d'avoine. Elles traversent l'intestin grêle et subissent une fermentation bactérienne dans le côlon, libérant des glucides absorbés par la muqueuse et des gaz émis par l'anus.
Outre leurs bienfaits sur le transit, les fibres piègent le cholestérol et les pigments de la bile, contribuant à abaisser le cholestérol sanguin. En revanche un excès de fibres insolubles (plus de 35 g par jour) peut avoir un effet irritant aggravé par une quantité insuffisante de boissons.
Bon à savoir : de récentes preuves scientifiques montrent que les régimes riches en fibres protégeraient contre l’inflammation intestinale en favorisant la libération d’acides gras à chaînes courtes au niveau du côlon, ces derniers contribuant à la diversité du microbiote et ayant un effet protecteur sur l’environnement colique.
L'absorption intestinale
La plus grande partie des produits de la digestion est absorbée dans l'intestin grêle, en dehors des quelques substances absorbées dans l'estomac.
Les éléments finaux absorbés par la muqueuse intestinale sont les sucres simples (glucose, fructose, galactose), les acides gras et les acides aminés.
L'absorption des nutriments se fait tout au long de l'intestin grêle.
- Chaque nutriment pénètre dans une cellule de la surface intestinale, la traverse passivement (glucose, sels), avec l'aide de transporteurs (acides aminés) ou sous forme de gouttelettes ou micelles (acides gras) avant d'être libérés dans un capillaire sanguin à l'autre extrémité de la cellule intestinale.
- Les sels minéraux, l'alcool, les vitamines sont absorbés sans modification par l'intestin grêle. Cette absorption se produit tout au long de l'intestin grêle, sauf pour le fer et le calcium, absorbés dans le duodénum.
Entre les boissons et les sécrétions digestives, 9 litres d'eau traversent chaque jour l'intestin grêle qui en récupère déjà 95 %. Le reste passe avec les déchets résiduels dans le côlon où la plus grande partie sera à son tour réabsorbée, sauf en cas de diarrhée.
Tous ces capillaires se regroupent dans les veines portes qui se dirigent vers le foie.
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Comprendre la digestion
Sommaire
- Anatomie et physiologie digestives
- Digestion : principe et fonctionnement